Si l’employeur peut rompre le contrat de travail au cours de la période d’essai, encore faut-il que cette rupture ne soit pas abusive.

Le droit de mettre fin librement et discrétionnairement à la période d’essai du salarié n’est pas absolu. L’essai ne doit pas être détourné de sa finalité : apprécier les capacités professionnelles du salarié.

La décision de l’employeur doit donc être fondée sur l’appréciation des compétences professionnelles de l’intéressé et, en aucun cas, sur un motif discriminatoire ou étranger à ses capacités.

La rupture doit intervenir pour un motif lié à la personne du salarié. Elle ne peut pas être justifiée par des raisons économiques. Ainsi, est abusive la rupture de la période d’essai fondée sur la décision de l’employeur de supprimer le poste du salarié qu’il vient de recruter ou sur le recours à l’activité partielle dans l’entreprise pendant la durée de la période d’essai. De même, est abusive la rupture de la période d’essai d’une serveuse de restaurant situé dans une station de sports d’hiver, rupture fondée sur le manque de neige. Il ne faut pas non plus que cette rupture soit l’occasion de détourner l’objet de la période d’essai. La conclusion d’un contrat à durée indéterminée rompu en période d’essai ayant pour seul objet de remplacer un salarié en congés payés entraîne la qualification de rupture abusive.

Pour qu’elle ne soit pas abusive, il faut donc que l’employeur mette le salarié dans les conditions normales d’exercice de sa fonction et qu’il n’agisse pas avec précipitation. Sinon, comment pourrait-il apprécier les capacités professionnelles du salarié ?

Sur ce fondement, les juges ont condamné un employeur pour rupture abusive de la période d’essai pour avoir mis fin à la période d’essai d’un salarié une semaine après le début des relations contractuelles, alors même que le salarié, âgé de 45 ans, venait de démissionner de son emploi précédent, qu’il effectuait un stage d’adaptation aux techniques de la société et qu’il n’avait pas encore été mis en mesure d’exercer les fonctions qui lui avaient été attribuées.

Plus récemment, un employeur a été condamné à verser à un salarié embauché en CDD les salaires courants jusqu’à l’expiration du contrat, soit 8400 euros car il avait rompu sa période d’essai deux jours après l’embauche du salarié. Les juges ont estimé que 2 jours étaient un délai insuffisant pour apprécier la valeur professionnelle d’un salarié, celui-ci n’ayant pas eu le temps de faire réellement preuve de toutes ses capacités, et l’employeur de les apprécier.

Tout dépend cependant des circonstances plus que de la durée, les juges ayant admis une rupture de période d’essai dès le 1er jour.

Intervention des représentants du personnel

Si un salarié dont la période d’essai a été rompue s’adresse aux représentants du personnel car s’estimant victime d’un abus de droit ou de discrimination, les représentants du personnel pourront lui conseiller d’intenter une action contre l’employeur pour le contraindre à justifier la rupture par des éléments objectifs. Si l’abus est avéré, le salarié peut prétendre, non pas à une réintégration dans ses fonctions, mais à des dommages et intérêts. Une réintégration est toutefois possible dans certains cas, par exemple si la rupture était fondée sur un motif discriminatoire. La rupture est alors considérée comme nulle et peut, faute de réintégration, ouvrir droit à des dommages et intérêts dont le montant est apprécié par les juges (sans que le plancher de six mois prévu pour le licenciement nul n’ait à être respecté).

Vous trouverez également dans la documentation « Les représentants du personnel et la défense des salariés » les textes officiels en rapport avec la thématique.

Source : Editions Tissot