Lorsque l’employeur consent un prêt au salarié, peut-il rembourser en opérant une compensation entre le salaire et les autres sommes qu’il doit au salarié dans le cadre de son contrat de travail et les remboursement dus par ce dernier au titre du prêt ? En pratique, la question se pose surtout à l’occasion de la rupture du contrat de travail. L’employeur peut-il procéder au remboursement anticipé sur le sole tout compte ?
Conditions du remboursement anticipé
La rupture du contrat de travail n’a pas d’incidence sur le prêt consenti au salarié, à défaut de convention expresse des parties. Pour le remboursement anticipé soit admis, la jurisprudence considère qu’il faut insérer une clause de remboursement anticipé (ou immédiat) dans la convention de prêt, et il ne faut pas que le licenciement soit abusif (Cass. soc, 4 décembre 2002, n°00-45550 ; Cass. soc. 30 mars 2011, n° 09-69515).
A défaut de clause prévoyant le remboursement immédiat, celui-ci se fera selon les modalités prévues par la convention.
Possibilité de compensation
L’employeur peut-il, lors du solde de tout compte, opérer une compensation entre, d’une part, les sommes dues au titre de la rupture du contrat de travail (indemnités de congé payés, de préavis, de rupture, etc.) et, d’autres part, les sommes restant dues par le salarié emprunteur au titre du remboursement du prêt ?
Rappelons tout d’abord que pour que la compensation s’opère de plein droit, les dettes réciproques détenues respectivement par le salarié et l’employeur doivent être certaines, liquides et exigibles (principe de droit civil). Sauf clause particulière prévoyant le remboursement immédiat du prêt en cas de rupture du contrat de travail, celle-ci n’a pas pour conséquence de rendre immédiatement exigibles les sommes restant dues par le salarié au titre du remboursement du prêt. Une distinction est opérée selon que les sommes constituent une avance en espèce ou un véritable contrat de prêt, distinct du contrat de travail.
Avance du salaire
La jurisprudence assimile souvent le prêt consenti par l’employeur (notamment lorsqu’il est sans intérêt) à une avance en espèces. Il s’ensuit que, lorsque les conditions de la compensation légale sont réunies, l’employeur est en droit de se rembourser au moyen de prélèvements successifs sur le salaire ne dépassant pas 10 % du montant des salaires exigibles (art L 3251-3 C. tr.). Cette limite s’impose également aux juges lorsque ceux-ci prononcent la compensation judiciaire.
Aucune limite n’est applicable sur les créances que le salarié détient sur l’employeur ne revêtant pas le caractère d’un salaire.
Contrat de prêt
Qu’il y ait ou non une clause prévoyant le remboursement en cas de rupture du contrat, la jurisprudence d’admet pas que l’employeur puisse compenser intégralement les sommes restant dues avec les salaires et indemnités dus au salarié (Cass. soc. 7 avril 1998, n°96-40145). En cas de refus du remboursement, alors qu’une clause le prévoit en cas rupture du contrat de travail, l’employeur devra saisir la justice ou mettre en oeuvre les garanties prévues dans le contrat de prêt. (ex. caution).
En conclusion, le remboursement anticipé du prêt est strictement encadré et la compensation est en pratique difficile.