Depuis ce lundi 1er mai, tout accord collectif d’entreprise doit recueillir la signature du ou des syndicats majoritaires pour être valide. Explications.

En 2016, la loi El Khomri a revu en profondeur tous les pans du droit de la négociation collective d’entreprise (obligation de rédiger un préambule à l’accord, développement des accords de méthode, accords par défaut à durée déterminée, nouvelles règles de publicité, etc.). Surtout, pour renforcer la légitimité des textes négociés par les partenaires sociaux, la loi Travail prévoyait de généraliser à tous les accords, à échéance du 1er septembre 2019, l’exigence majoritaire. Compte tenu de l’autonomie encore plus forte donnée par les ordonnances Macron aux syndicats pour définir la règle de droit qui doit s’appliquer en entreprise, la nouvelle majorité présidentielle a décidé d’avancer cet horizon au 1er mai 2018.

Exit, donc, la règle, introduite il y a 10 ans, d’adoption des accords collectifs soumise à la signature de syndicats représentant au moins 30% d’audience électorale (minorité d’adhésion) et à l’absence d’opposition majoritaire. Place à la consécration de l’accord d’entreprise majoritaire et, à défaut, de la validation par référendum des accords minoritaires. Présentation.

Pour certains accords, il fallait déjà une majorité
L’échéance, au 30 avril, de la période transitoire prévue par les ordonnances du 22 septembre 2017 constitue l’aboutissement d’un mouvement engagé depuis plusieurs années. Ainsi, la nécessité d’un accord majoritaire s’appliquait déjà :

  • aux anciens accords de maintien de l’emploi conclus dans le cadre de la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 ;
  • depuis l’entrée en vigueur des ordonnances du 22 septembre 2017, aux nouveaux accords de préservation ou de développement de l’emploi ;
  • depuis le 1er janvier 2017, aux accords sur la durée du travail, les repos et les congés.

 

Plan A : l’accord d’entreprise doit être majoritaire
Désormais, la validité de tout accord d’entreprise ou d’établissement est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel (ou au comité social et économique s’il est mis en place dans l’entreprise), quel que soit le nombre de votants. Logiquement, la mécanique du droit d’opposition disparaît.

 

Il est bien précisé que la validité de l’accord s’apprécie au regard « des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections ». Cette formule signifie qu’il faut calculer le « poids relatif » des syndicats reconnus représentatifs dans l’entreprise ou l’établissement. Pour rappel : cette règle facilite la conclusion de l’accord en ne prenant pas en compte les votes exprimés en faveur des syndicats qui n’ont pas franchi le seuil des 10% d’audience électorale.

 

Plan B : un accord minoritaire peut être validé par référendum

Toutefois, et pour limiter les situations de blocage de la négociation collective dans l’entreprise, si les organisations syndicales signataires n’atteignent pas le seuil de 50 % mais ont recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives aux élections, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations peuvent demander une consultation des salariés visant à valider l’accord. Elles disposent d’un délai d’un mois à compter de la signature de l’accord pour formuler cette demande. Celle-ci doit être notifiée par écrit à l’employeur et aux autres organisations syndicales représentatives. Au terme du délai de ce délai d’un mois (c’est-à-dire à défaut d’initiative des organisations syndicales signataires), l’employeur peut demander l’organisation de cette consultation, à condition toutefois qu’aucune organisation syndicale signataire ne s’y oppose.

Si, à l’issue d’un délai de 8 jours à compter de cette demande ou de l’initiative de l’employeur, les éventuelles signatures d’autres organisations syndicales représentatives n’ont pas permis d’atteindre le taux de 50 %, la consultation des salariés doit alors être organisée dans un délai de 2 mois.

La consultation des salariés : la procédure
La consultation des salariés a lieu pendant le temps de travail, au scrutin secret sous enveloppe ou par voie électronique. Son organisation matérielle incombe à l’employeur.

La consultation se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral, selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l’employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives (signataires ou non de l’accord soumis à consultation) ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel (ou au comité social et économique s’il est mis en place dans l’entreprise), quel que soit le nombre de votants.

Ce protocole doit comporter :

  • la liste des salariés couverts par l’accord qui, à ce titre, doivent être consultés;
  • les modalités de transmission aux salariés du texte de l’accord ;
  • le lieu, la date et l’heure du scrutin ;
  • l’organisation et le déroulement du vote ;
  • le texte de la question soumise au vote.

Le résultat du vote fait l’objet d’un procès-verbal dont la publicité est assurée dans l’entreprise par tout moyen. Ce procès-verbal est annexé à l’accord lors de son dépôt.

L’accord est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés. Faute d’approbation, il est réputé non écrit.

 

Article publié le 3 mai 2018 – ©  Actuel CE