Conformément à l’article 12, II de la loi du 9 décembre 2016, dite « Sapin 2 », dans sa rédaction issue de l’article 8 de la loi du 21 mars 2022 relative à la protection des lanceurs d’alerte, le conseil des prud’hommes peut, à l’occasion de tout litige, obliger l’employeur, en plus de toute autre sanction, à verser sur le compte personnel de formation (CPF) du salarié lanceur d’alerte un abondement pouvant aller jusqu’à 8 000 euros.
Pris en application de ce texte, le décret du 28 décembre 2022 précise les modalités d’application de ce dispositif, dont l’entrée en vigueur est fixée au 30 décembre 2022.
Rappelons que le CPF est un compte crédité en euros permettant à son titulaire de financer, à son initiative, une action de formation, un parcours de validation des acquis de l’expérience ou encore un bilan de compétences (articles L.6323-1 et suivants du code du travail).
La sanction visant à abonder le CPF est prononcée à l’encontre de l’employeur par le conseil de prud’hommes saisi, à l’occasion de tout litige, par le salarié (article D.6323-3-4, I nouveau du code du travail) :
- lanceur d’alerte, qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, du droit de l’Union européenne, de la loi ou du règlement ;
- facilitateur, qui aide un lanceur d’alerte à effectuer un signalement ou une divulgation ;
- en lien avec un lanceur d’alerte (collègue ou proche par exemple), qui risque de faire l’objet de représailles dans le cadre de son activité professionnelle de la part de son employeur ou d’un client notamment.
Avant de fixer le montant de l’abondement, le conseil de prud’hommes doit tenir compte des droits déjà inscrits sur le compte du salarié bénéficiaire, ainsi que de la somme maximale pouvant être créditée sur le CPF. Ce plafond est fixé, non pas à 5 000 euros comme pour un salarié « classique », mais à 8 000 euros au même titre qu’un salarié « peu qualifié » (article D.6323-3-4, III nouveau du code du travail).
Il en résulte que la somme fixée par le conseil des prud’hommes ne peut excéder la différence entre ce plafond de 8 000 euros et le montant des droits inscrits sur le compte du salarié concerné (article D.6323-3-4, III nouveau du code du travail).
► Exemple : le conseil de prud’hommes saisi par un salarié lanceur d’alerte bénéficiant sur son CPF, avant le jugement, d’un crédit de 2 500 euros peut condamner l’employeur à verser un abondement d’un montant maximal de 5 500 euros.
La somme fixée par le juge au titre de l’abondement du compte du lanceur d’alerte doit être versée par l’employeur à la Caisse des dépôts et consignations (CDC), accompagnée des informations nécessaires à cet abondement (montant, nom du salarié bénéficiaire, données permettant son identification, etc.) (article D.6323-3-4, III et IV nouveau du code du travail).
Le CPF du salarié concerné est alimenté, dès réception du montant correspondant, sans qu’y fassent obstacle les alimentations intervenues postérieurement au jugement (article D.6323-3-4, III nouveau du code du travail). Autrement dit, si le compte du salarié est alimenté par une autre source entre la date du jugement et la date de versement de l’abondement, et que cet abondement a été fixé par le juge à une somme entraînant l’atteinte du plafond de 8 000 euros, le crédit total du CPF de l’intéressé pourra dépasser, à la fin de l’opération, ce plafond.
Les sources d’alimentation du CPF sont multiples : crédit annuel calculé en fonction de la durée du travail du salarié, abondement-correctif au titre de l’entretien professionnel, abondement dans le cadre d’un accord de performance collective, etc.).
Ces démarches (transmission des informations et versement de l’abondement) doivent être effectuées par l’employeur, au plus tard, à la date mentionnée par le jugement du conseil des prud’hommes ou, à défaut de mention dans ce jugement, au dernier jour du trimestre civil suivant la date du jugement du conseil des prud’hommes (article D.6323-3-4, V nouveau du code du travail).